Les îles Caraïbes : biodiversité, menaces, et conservation

Les îles Caraïbes accueillent une grande diversité d’écosystèmes, allant des forêts de montagne aux cactus des garrigues qui ont été dévastés par la déforestation et la destruction des habitats. Ce hotspot abrite des dizaines d’espèces extrêmement menacées avec notamment deux espèces de Solenodon et le Crocodile de Cuba.

Les îles Caraïbes se composent principalement de trois grands groupes d’îles entre l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud : les Bahamas, les petites Antilles et les Grandes Antilles (Porto Rico, Jamaïque, Cuba et Hispaniola, incluant la République dominicaine et Haïti). D’un point de vue juridique, les Caraïbes sont composés de 12 pays indépendants ainsi que de territoires français, britanniques, américains et néerlandais. Le hotspot est présente sur une surface de 4 millions de km² d’océans et 230 000 km² de superficie terrestre.

L’altitude au sein du hotspot varie de manière conséquente, s’étalant d’une altitude de plus de 3000 m (ex glacier au sommet du Pico Duarte) à une dépression désertique de 40 m au dessous du niveau de la mer, sur Hispaniola. Les îles à faible altitude ont tendance à être semi-aride, et la plupart ont été dominée par des broussailles sèches et persistantes avec des cactus, des savanes et des arbustes épineux présents sur Barbuda, la Jamaïque et Porto Rico (où la moyenne des précipitations à basse altitude est seulement de 300 à 600 mm par an).

D’autre part, les milieux humides sont présents où les alizés des Caraïbes rencontrent les plus hautes montagnes antillaises, ce qui donne lieu à une variété de forêts tropicales humides, y compris des forêts de marais, des forêts saisonnières, des forêts de montagne. Dans les zones les plus humides, autour des lagunes et des estuaires, les milieux saumâtres et les marais d’eau douce laissent la place à de vastes forêts de mangrove.

Une biodiversité unique et menacée

Flore

La diversité végétale et l’endémisme sont très élevés dans les îles des Caraïbes, avec environ 13.000 espèces, dont plus de 6500 espèces endémiques d’une seule île. L’endémisme à des niveaux plus élevés est également exceptionnel, avec plus de 205 genres et une famille de plantes, la Goetziaceae, qu’on ne trouve nulle part ailleurs sur Terre.

L’endémisme est également significative au niveau de l’île, environ un quart de la flore vasculaire de la région est limitée à une seule île – Cuba. Cuba est de loin la plus importante des îles de la région en termes de biodiversité, en particulier pour la diversité végétale, avec plus de 6500 espèces de plantes vasculaires, dont près de la moitié sont endémiques. La plus grande île de la chaîne des Antilles, Cuba représente environ 48 pour cent de la superficie de l’ensemble du hotspot, et abrite plus de la moitié des espèces de plantes endémiques de la région, ce qui en fait une priorité de conservation pour les Caraïbes. Parmi les genres endémiques dans le hotspot, environ 120 sont limités à une seule île.

L’Acajou des Caraïbes (Swietenia mahagoni, EN), un cousin de l’Acajou du Honduras (Swietenia macrophylla, VU) d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale, a été largement exploité dans la région pour le bois. L’espèce a disparu de certaines parties de sa gamme de répartition, et les autres vieux peuplements ont été pillés. D’autres espèces de grande valeur économique pour le bois dans les îles des Caraïbes incluent les noix (Juglans jamaicensis, VU), Ebene de la Jamaïque (Brya ebenus), et poirier des Antilles (Tabebuia heterophylla).

Faune

Oiseaux

Il existe plus de 600 espèces d’oiseaux dans les îles des Caraïbes, dont environ 160 sont endémiques, limitées à quelques petites zones sur des îles. 36 genres sont endémiques à la région, ainsi que deux familles : l’Esclave palmiste (Dulus Dominicus) de la famille des Dulidae et les todiers (famille Todidae). BirdLife International reconnaît six primaires et deux secondaires Endemic Bird Areas (EBAS) dans le hotspot des îles des Caraïbes. Quarante-huit espèces endémiques du hotspot sont menacées d’extinction, y compris l’engoulevent de Porto Rico (Caprimulgus noctitherus, CR), le Râle de Zapata (Cyanolimnas cerverai, EN), le Troglodyte de Zapata (Ferminia cerverai, EN), la Colombe de Grenade (Leptotila wellsi, CR).

Treize espèces d’oiseaux ont déjà disparu, six de ces espèces étaient du genre Ara. L’Ara tricolore (Ara tricolor), le dernier des six aras à disparaître, a été chassé jusqu’à l’extinction pour l’alimentation et le commerce des animaux au cours de la deuxième moitié du 18e siècle. Le spectaculaire Pic à bec ivoire (Campephilus principalis), qui est recensé dans tout Cuba et les bas fonds du sud des Etats-Unis, n’a pas été enregistré à Cuba depuis 1987. Cependant, de récents rapports de l’espèce de l’Arkansas, bien que controversé, donne un espoir renouvelé en vue de son éventuelle persistance à Cuba, et il est toujours listé comme en danger critique d’extinction, plutôt que comme officiellement disparu.

Un des plus importants symboles de la conservation des oiseaux dans les Caraïbes sont les perroquets, et notamment le Perroquet de Saint-Vincent (Amazona guildingii, VU), le perroquet de Sainte-Lucie (Amazona versicolor, VU), et le perroquet impérial (Amazona imperialis, EN) de la Dominique. Les trois espèces sont très colorées et ont besoin de forêts non perturbées pour la survie. Une autre espèce remarquable est le colibri abeille (Mellisuga helenae) de Cuba. Ce petit oiseau, qui mesure seulement 5,5 centimètres de long et pèse 1,95 grammes, est le plus petit oiseau du monde.

Mammifères

Les îles des Caraïbes abritent près de 90 espèces de mammifères, dont plus de 40 sont endémiques. Cela inclut deux familles endémiques de rongeurs: les Solenodontidae et les Capromyidae. La famille des Solenodontidae comprend deux espèces encore vivantes : le Solenodon de Cuba (Solenodon cubanus, EN), et l’Alquimi paradoxal (S. paradoxus, EN), qui sont de rares musaraignes géantes menacées par l’exploitation humaine et les espèces envahissantes (mangoustes, chats, rats et chiens). La famille des Capromyidae comprend 20 espèces de rongeurs, connu localement sous le nom hutias qui sont prisés pour leur viande et menacés par la chasse, la perte d’habitats et les espèces envahissantes. La région accueille 15 genres endémiques, y compris des chauves-souris se nourrissant de fruits.

Le Lamantin des Caraïbes (Trichechus manatus, VU) est originaire de Cuba, Hispaniola, Puerto Rico et de la Jamaïque. Dans le monde entier, les lamantins sont de plus en plus menacés par la pêche commerciale et de la mortalité par collision avec les bateaux. Une autre espèce de mammifère marin a déjà disparu : le phoque moine des Caraïbes (Monachus tropicalis, EX), qui était autrefois très répandu dans les Caraïbes, a été chassé dans l’indifférence, avec le dernier individu recueillie en 1965. Au total, 19 espèces de mammifères endémiques à la fois dans les Caraïbes sont récemment disparues (depuis 1500), dont quatre espèces de Nesophontes, des espèces proches de solenodons.

Reptiles

Les îles des Caraïbes sont particulièrement riches en reptiles, avec plus de 500 espèces de reptiles, dont près de 470 d’entre eux (94%) sont endémiques. La diversité ici comprend plusieurs grandes lignées évolutives lézards, tels que le anolis (Anolis; 154 espèces, 150 endémiques), les geckos nains (Sphaerodactylus; 86 espèces, 82 endémiques), et les Lézards à queue courbée (Leiocephalus; 23 espèces, toutes endémiques), qui tiennent leur queue dans une bobine quand ils courent. Ces espèces de lézards comprennent le plus petit lézard du monde, Sphaerodactylus ariasae de la République dominicaine et Sphaerodactylus parthenopion des îles Vierges américaines.

On y retrouve également le plus petit serpent du monde, Leptotyphlops bilineata, qui pourraient se glisser dans un crayon si la mine était supprimée. Leptotyphlops est un des grands groupes de serpents dans ce point chaud, y compris les grands boas (Epicrates, neuf espèces), un genre de serpents qui changent de couleurs (Tropidophis; 26 espèces, toutes endémiques) et des serpents se déplaçant rapidement (Alsophis ; 13 espèces, toutes endémiques). Le Crotale unicolore d’Aruba (Crotalus unicolor, CR), endémique à Aruba, est le crotale le plus menacé dans le monde. Bien qu’il y ait moins de 250 individus à l’état sauvage, le serpent a été au centre d’un programme de conservation significatif et réalisé avec succès, de sensibilisation du public et de programmes de recherche. Un total de six genres de serpents sont endémiques à la zone.

On retrouve également parmi les reptiles, neuf espèces d’iguanes de rochers du genre Cyclura, toutes menacées, y compris certaines espèces qui mesurent plus d’un mètre de longueur. Le Cyclure terrestre de la Jamaïque (Cyclura collei, CR) était considéré comme éteinte jusqu’à ce qu’une petite population d’environ 200 individus ait été redécouverte en 1990 dans les collines de la Jamaïque. Le Crocodile de Cuba (Crocodylus rhombifer, CR) était présent sur Cuba et dans les îles Caïmans et les Bahamas, mais il se retrouve maintenant seulement dans les marais de Zapata, et c’est l’espèce de crocodile la plus menacée du nouveau monde.

Amphibiens

Les Caraïbes abritent également des amphibiens endémiques, avec l’ensemble des 170 espèces d’amphibiens de quatre familles de grenouilles (les Bufonidae, Dendrobatidae, Hylidae, et Leptodactylidae) endémiques de la zone. Toutes, sauf quelques espèces, sont endémiques d’une seule île.

Plus de 80% des amphibiens trouvés dans les Caraïbes appartiennent au genre Eleutherodactylus, des grenouilles de forêt qui pondent leurs oeufs sur le sol et l’éclosion donne directement des adultes en miniature, sans stade têtard. Une espèce ne portant pas encre de nom commun (Eleutherodactylus iberia, CR) est le plus petit tétrapode de l’hémisphère Nord, avec une longueur de seulement 10 millimètres. Une des plus grandes espèces de grenouilles arboricoles (Hylidae) dans le monde, la grenouille Jamaïcaine (Osteopilus crucialis, EN), a une longueur d’environ 120 millimètres et se reproduit en Jamaïque, où les mâles de cette espèce en déclin, font un fort ronflement d’appel.

On retrouve également dans ce hotspot la Grenouille de la montagne de Montserrat (Leptodactylus fallax, CR), la deuxième plus grande grenouille de l’hémisphère occidental. Cette grenouille a subit un déclin rapide en raison de la consommation humaine, la perte d’habitat et des maladies.

Poissons d’eau douce

Les îles des Caraïbes ont plus de 160 espèces de poissons d’eau douce, dont environ 65 sont endémiques d’une ou plusieurs îles. Comme dans d’autres hotspots insulaires, il y a deux groupes distincts de poissons d’eau douce dans les Caraïbes: sur les petites et jeunes îles, la plupart des poissons sont des espèces qui sont répandues dans les eaux marines, mais aussi entre dans une certaine mesure dans l’eau douce, tandis que sur les grandes et veilles îles des Grandes Antilles, il existe plusieurs groupes qui occupent les eaux intérieures.

Menaces écologiques

L’Homme est présent dans les Caraïbes depuis plus de 4000 ans. Toutefois, ce n’est que depuis les 500 dernières années que la dégradation de l’environnement est la plus marquée. Elle a commencé par l’arrivée des premiers européens sur Hispaniola en 1492. La première vague de déboisement a débuté au début des années 1500, pour les plantations de canne à sucre. La canne à sucre est encore dans les Caraïbes la culture la plus importante.

Un autre impact majeur de l’arrivée des colons a été l’introduction d’espèces exotiques, qui est la plus grande menace pour la biodiversité dans cette zone. Même avant l’arrivée des européens, les personnes vivant dans les Caraïbes transportaient des espèces qui leur servaient de nourriture d’une île à l’autre. La petite mangouste asiatique(Herpestes javanicus), qui a d’abord été introduit en 1872 pour contrôler les rongeurs et les serpents venimeux, a dévasté les populations de reptiles et d’amphibiens et conduit à la disparition de dizaines d’espèces. Les rats, les chats, chiens, chèvres, ânes, singes, le tilapia, la truite font également peser une grave menace pour la faune.

Les ressources naturelles et les écosystèmes ont été dévastés dans certaines îles. Par exemple, pas moins de 92 % des espèces d’amphibiens sur Haïti sont menacées d’extinction (les pays du top 5 avec le plus fort pourcentage d’amphibiens menacés sont tous des Caraïbes: Haïti, République dominicaine, Cuba, la Jamaïque et Puerto Rico). L’agriculture reste une menace sérieuse dans certaines parties du hotspot. Le cacao, le café, et les plantations de tabac menacent les grandes étendues de forêt vierge restantes. L’exploitation minière de la bauxite, de sable et de gravier, ainsi que la production de charbon de bois à partir de la végétation naturelle pour satisfaire aux besoins énergétiques constituent aussi une menace pour la biodiversité du hotspot.

Le développement du tourisme effectue également une pression sur les écosystèmes naturels dans certaines îles, en particulier dans la modification des paysages locaux avec la plantation d’espèces exotiques, les parcours de golf, les routes et des infrastructures touristiques.

Aujourd’hui, pas plus de 23.000 km², soit 10% de la végétation d’origine, reste dans un état vierge dans les îles des Caraïbes. Moins de 15% des forêts de Cuba restent intactes, ce sont les plus grandes étendues de forêt dans la région des Caraïbes.

Mesures de conservation et protection des milieux naturels

Environ 30 000 km², soit 13 % de la superficie de ce hotspot, est officiellement protégé, mais un grand nombre de ces aires protégées sont loin d’être vierge de tout impact. Un peu plus de la moitié de la superficie des terres protégées, totalisant un peu plus de 16.000 km² rentrent dans les catégories de l’UICN I à IV, qui offrent une plus grande protection. En général, il y a une nécessité d’une plus grande gestion, de suivi et d’application des zones protégées dans les Caraïbes. Cuba dispose d’environ 15% de son territoire en unités de conservation, y compris les 300 km² de marais de Zapata. Dominique a un peu plus de 20% de son territoire désigné en zone protégée, tandis que la République dominicaine a 15%. Cependant, beaucoup de ces réserves officielles manquent de plans de gestion, et sont trop petites pour la conservation de la biodiversité de manière efficace. Dans d’autres pays, les zones protégées sont quasi inexistantes, comme c’est le cas en Haïti et à Grenade, qui ont tous les deux moins de 1,7 % de leur zone protégée.

Une grande variété d’organisations locales travaille à la promotion des efforts de conservation dans les Caraïbes. Par exemple, Grupo Jaragua, un groupe de citoyens et des scientifiques dans la République dominicaine, aident à soutenir et à gérer le Jaragua National Park, l’un des plus grands parc terrestre et maritime du hotspot. En Haïti, la Fondation pour la protection de la biodiversité marine travaille avec les pêcheurs et le gouvernement pour promouvoir l’utilisation durable des ressources biologiques marines des pays. Une organisation non gouvernementale, le Bahamas National Trust, gère le parc national des Bahamas, qui couvre 20% de la zone maritime du pays. A Bonaire, la fondation pour les parcs nationaux gère activement le parc marin de Bonaire, qui est largement reconnu comme l’un des moyens les plus efficaces de réserves marines à l’intérieur de la zone. Son homologue de Saint-Eustacius, une île avec seulement 2000 personnes, fournit un appui technique pour des programmes allant du marquage de la tortue de mer et au suivi récifs encore intactes des îles.

Les perspectives pour la conservation de la biodiversité dans les îles des Caraïbes ont été renforcées par le développement des partenariats entre les grandes industries, comme le tourisme, et les organismes gouvernementaux et privés qui travaillent à la conservation sur le terrain. Le Protocole pour les aires spécialement protégées et à la vie sauvage (SPAW), qui est entré en vigueur en 2000, a été créé à l’initiative des pays des Caraïbes à l’échelle de la région pour fournir des normes et des mécanismes pour harmoniser les efforts de conservation dans la région.

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